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On parle d’abus de biens sociaux pour indiquer un délit commis par un dirigeant d’une société commerciale. Ce délit concerne le détournement de biens meubles ou immeubles aussi bien que tous les encaissements de l’entreprise. Dans de tels cas, les représentants de la société auraient utilisé leurs pouvoirs sociaux à des fins personnelles ou tout autre usage contraire à l’intérêt social de l’entreprise, au profit d’un individu ou d’une autre entreprise. Le gérant peut aussi se servir de ses pouvoirs pour investir dans une société tierce au détriment de celle à qui les biens étaient destinés.
Afin de protéger le patrimoine de l’entreprise, le droit des affaires marocain a adopté la notion de l’abus de biens sociaux en établissant différentes répressions. Voici tout ce qu’il faut savoir au sujet de l’abus de biens sociaux en droit marocain.
Personnes indexées en cas d’abus de biens sociaux
Le délit d’abus de biens sociaux peut être endossé aux gérants de la société aussi bien que toute personne qui aura exercé la gestion de l’entreprise en lieu et place des représentants légaux que ce soit de manière directe ou indirecte. Ainsi, même les associés de l’entreprise qui n’auront pas été mandatés comme gérants ne seront pas aptes à exercer la gestion de l’entreprise en termes d’analyse des états, de partage des dividendes ou d’utilisation des biens de la société à titre personnel.
Les éléments à prendre en compte en cas d’infraction
Avant de parler des éléments à prendre en compte, il est bon de savoir que l’abus de bien sociaux peut être dénoncé par un des associés. Ce dernier peut lancer la procédure dans le cas où il remarque l’encaissement d’un chèque de produit vers le compte personnel d’un associé, ou du gérant au lieu de celui de l’entreprise. Cet associé a le pouvoir d’agir pour le compte de la société victime en posant une action sociale, sans toutefois constituer à lui seul une partie civile qui lui permettrait d’avoir réparation du préjudice concerné par le gérant en tort.
En ce qui concerne l’abus de biens sociaux, il faut prendre en considération différents éléments constitutifs à savoir l’élément légal, l’élément matériel, et l’élément moral de l’infraction.
Le volet légal concerne simplement l’article 384-3 de la loi 17-95, et l’article 107-3 de la loi 5-96. La première loi concerne spécifiquement les sociétés anonymes et la deuxième concerne la loi relative à la SARL.
Le volet matériel de l’infraction concerne le détournement des biens ou crédits à des fins personnelles et non professionnelles, les actes des dirigeants à des fins personnelles pour soutenir les intérêts économiques autres que ceux de l’entreprise dans lesquelles ils sont intéressés. Et, le volet moral de l’infraction concerne l’intention frauduleuse ou l’intention avec laquelle l’associé ou le gérant a agi, notamment dans le but de nuire aux intérêts de l’entreprise. Les tribunaux ont la responsabilité de constater l’élément intentionnel ou la mauvaise foi des personnes en cause, ce qui permet d’inculper en se basant sur les répressions prévues dans la loi selon la forme juridique de l’entreprise. En d’autres mots, si l’associé en faute était pleinement conscient des conséquences de son acte sur l’entreprise et qu’il a quand même posé son action, ce caractère préjudiciable peut le soumettre à des sanctions.
Répression prévue par la loi en cas de délit constaté
Selon l’article 384 de la loi 17-95, une peine d’emprisonnement allant de 1 à 6 mois est prévue pour tous les membres de direction, les membres des organes d’administration ou les gestionnaires de SA. Hormis la peine d’emprisonnement, une amende comprise entre 100 000 à 1 000 000 de dirhams est aussi à prévoir. La loi donne la possibilité de choisir l’une ou l’autre de ces peines selon le contexte. Toutefois, cette liberté de choix est d’abord accordée aux tribunaux qui décideront de la sanction selon la nature du tort causé. Les personnes accusées pourront à leur tour faire appel en cas de désaccord.
Pour les gérants des autres formes juridiques (SARL par exemple), la loi prévoit également un emprisonnement de 1 à 6 mois ou une amende comprise entre 10 000 à 100.000 DH.
Détail de l’article 384 de la loi 17-95
L’amende prévue par l’article 384 concerne tout partage de dividendes fictifs entre les actionnaires sans que les représentants légaux ne fournissent d’inventaire. De même, s’il est avéré que ces derniers se sont servi d’inventaires frauduleux, cela peut faire l’objet d’une amende. Cet article s’applique aussi en cas de dissimulation des véritables états de synthèse donnant un résultat erroné du patrimoine et de la situation financière de l’entreprise. Dans le cas aussi où les dirigeants utilisent les biens et les crédits de la société à des fins personnelles ou pour tout autre intérêt contraire à ceux de l’entreprise, ces dirigeants seront soumis aux amendes précitées par l’article 384 de la loi.
Il faut noter que dès leur entrée dans le capital de l’entreprise, les associés ont l’obligation d’utiliser leurs voix et leurs pouvoirs pour le bon fonctionnement de l’entreprise. Ainsi donc, s’ils se servent de leurs pouvoirs pour agir contrairement aux intérêts de la société de manière intentionnelle, ces dirigeants sont soumis à la loi et doivent pour cela payer une amende ou encourir la peine de prison. Nous rappelons aussi que les associés ne doivent pas se servir de leurs pouvoirs pour favoriser une autre société au détriment de l’entreprise dans laquelle ils sont intéressés.
Pour terminer, nous pouvons dire que le droit marocain accorde une grande importance à tous les dirigeants d’entreprises, peu importe la forme juridique. Ces dirigeants ont certes beaucoup de pouvoirs et sont accompagnés dans la création et la gestion de leurs entreprises au quotidien. Mais, le revers de la médaille est qu’ils soient concernés de fait ou de droit dans tous les actes qu’ils posent et peuvent ainsi engager leur responsabilité pénale en cas d’infraction. Ainsi donc, chaque dirigeant a l’obligation de veiller à toutes les actions menées au nom de l’entreprise ou en utilisant les biens appartenant à celle-ci.
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